Étoile de l’Opéra de Paris, Germain Louvet se raconte dans Des choses qui se dansent. À travers ces choses qui se disent, le danseur s’oppose aux violences machistes et aux clichés genrés.
L’Étoile rouge. Tel est le surnom de Germain Louvet. En effet, le danseur Étoile de l’Opéra de Paris est engagé à gauche. Et, dans Des choses qui se dansent paru chez Fayard, son récit est politique à plus d’un titre. Il partage ses réflexions sur les discriminations sociales et raciales, la démocratie culturelle, et la diversité notamment sexuelle.
Au détour d’un chapitre, bondit le petit Germain, saisi par l’énergie et la passion de la danse. À cet âge, il ne se sent appartenir à aucun genre. Quelques années plus tard, l’adolescent découvre son homosexualité. Alors que ce n’est pas un sujet pour ses proches, l’apprenti danseur ne peut se projeter dans aucun modèle gay positif, car il n’en voit pas.
Résister contre les violences machistes
Germain Louvet raconte également les coulisses de l’Opéra, faites de joies et de dérapages. Ainsi, une répétition sous la direction d’un chorégraphe à la masculinité toxique se transforme en une série de harcèlements et d’agressions sexuels.
Parmi plusieurs danseurs masculins, l’examinateur doit choisir son futur interprète. Dès le premier contact, il les « déshabille avec ses yeux ». Puis « l’homme s’extasie en des insinuations sexuelles grossières, sexistes, machistes mais surtout caricaturales ». Et « ça l’excite ».
Après la parole, vient le geste. « Il se met à jouer [le rôle de] la Mort avec chacun (…), avec ce que cela implique de frottements des corps, d’intimité et de sensations charnelles ». Se met en place un « corps-à-corps malsain qui n’a pas lieu d’être ».
En l’occurrence, Germain Louvet rappelle qu’un homme en position de pouvoir peut, même face à d’autres représentants du sexe dit fort, abuser de sa soi-disant supériorité. Pis, il franchit la limite de la légalité. Les hommes sont alors victimes et violentés. Néanmoins, l’Étoile s’affirme et résiste. Son attitude lui coûtera le rôle, mais préservera son intégrité.
Résister contre les stéréotypes genrés
Queer, Germain Louvet s’interroge sur l’omniprésence de la virilité exacerbée dans la danse classique. Il a conscience qu’il « perpétue ainsi une vision archaïque d’idéaux uniformes [qu’il s’impose] jusqu’à exploser. Toujours occulter la diversité, la différence et la multitude de personnalités qui existent. »
Pour être crédible dans le cliché, il « [s’]hétérosexualise », puisque seule cette orientation est représentée dans les œuvres classiques. Sa « véritable identité sexuelle » disparaîtrait. Il explique ce que signifie cette déchirure :
« L’homme puissant et sûr de lui que je dois incarner est celui qui m’écrase à coups de talon, me tabasse le soir dans la rue si je fais preuve de trop d’exubérance ou si je tiens la main d’un autre homme. L’homme que j’incarne est celui qui met des mains au cul impunément, qui siffle les filles dans le métro en se marrant. »
Cependant, le danseur ne se censure pas. Sur scène, il s’exprime avec sa « propre voix ». Sa personnalité continue de briller. La liberté et la singularité sont essentielles dans l’expression artistique.
En fait, l’Étoile rouge tend vers d’autres couleurs, dont le rose des luttes LGBTQ+.