Au-delà de sa gentillette apparence, le film Disney Hocus Pocus s’attaque au patriarcat avec des sorcières et un ado hors de la norme. De quoi passer une satanée fête d’HalloQueer !
En 1993, sort la comédie Hocus Pocus, réalisée par Kenny Ortega et maintenant disponible sur Disney+. À Salem, les sœurs et sorcières Sanderson reviennent à la vie le soir d’Halloween. Pour être éternelles, elles doivent absorber la force vitale d’un.e enfant avant le lever du soleil.
Ouvertement gay, le réalisateur assume l’esthétique queer qu’il insuffle à ses œuvres. En l’occurrence, Ortega a demandé aux actrices de jouer leur personnages comme si elles étaient des drag queens. C’est pourquoi cette comédie appartient à l’iconographie queer, voire camp. Elle est considérée comme le meilleur film gay d’Halloween par de nombreux.ses fans.
Des icônes gay interprètent des sorcières drag queens
Les rôles des sœurs sorcières sont joués par trois icônes queer :
- L’actrice et chanteuse engagée pour la cause LGBTQ+, Bette Midler
- La chroniqueuse ès sexe de Sex and the City, Sarah Jessica Parker
- La nonne à la voix perçante de Sister Act et tout aussi engagée, Kathy Najimy
Leur tenue, leur maquillage, leur perruque sont over-the-rainbow. Leurs gestes sont exagérés. Pour Winifred (Bette Midler), ils sont amplifiés par les moulinets de ses mains et ses ongles longs. Leurs déplacements, surtout en trio, sont chorégraphiés. Bref, les sorcières ressemblent effectivement à des drag queens.
Et elles s’expriment comme telles. À l’instar d’une famille drag, elles vénèrent leur mère et s’interpellent avec des « sisters » stridants. Winnie appelle son livre de sorts « darling ». Quant à la sexuelle Sarah (Sarah Jessica Parker), elle s’écrit « a boy! » et se touche les seins à la vue d’un adolescent. Retrouvant sa jeunesse et sa beauté, elle s’exclame, avec plaisir, que les garçons, qu’elle adore torturer au sens propre, l’aimeront à nouveau.
Même leur nom de famille rappelle leur nature. « Sanderson » signifie fils d’Alexandre en vieux normand. Elles seraient donc des hommes travestis, ce que remarque un enfant. Il nomme Winifred « man » et traite la sororité de « weirdos », de personnes bizarres.
Car les Sanderson sont hors norme et contre la norme. Winnie dit qu’une belle journée la rend malade. Pour autant et alors qu’elles vont être pendues pour leurs méfaits, elles rejettent la dénomination « sorcières ». Elles revendiquent être de simples vieilles filles célibataires.
De nos jours, la figure de la sorcière est considérée féministe et en lutte contre le système patriarcal. D’ailleurs, les trois sœurs réagissent en féministes, quand elles sont appelées « chicks » ou « poulettes ». En fin de compte, serait-elles victimes d’une propagande anti-sorcière hétérosexuelle ?
Un ado puceau voit sa masculinité questionnée
Un autre personnage dérange le patriarcat : Max (Omri Katz). Nouveau venu à Salem, l’adolescent est moqué tout au long du film, parce qu’il ne ressemble pas à un mâle archétypal et toxique.
Sa masculinité est donc remise en cause. Originaire de Los Angeles, Max est surnommé « Hollywood » et féminisé par deux camarades harceleurs. Telle Cendrillon, il retourne chez lui pieds nus, puisque ses nouveaux « amis » lui ont volé ses baskets. Sa propre sœur, Dani (Thora Borch), pense qu’il est anormal. Elle va jusqu’à parier avec lui qu’il se déguisera en Peter Pan pour la prochaine fête d’Halloween, collants inclus. À son tour, Winnie provoque l’hilarité de Sarah, lorsqu’elle appelle Max « dude » – « mec » –, le petit nom semblant peu crédible.
Il faut dire que l’ado a un modèle détonnant et inspirant : pour la soirée, sa mère porte un déguisement de Madonna, une autre icône gay, avec les fameux seins coniques.
Même si Max demande à son crush Allison (Vinessa Shaw) de le « convertir », sa masculinité paraîtra davantage entachée. En effet, les sœurs Sanderson peuvent revenir à la vie, si un.e vierge allume la bougie à flamme noire. Crédule, Max veut faire le malin. Il allume la bougie. Et les sorcières ressuscitent. Dani est alors stupéfaite de constater que son frère est encore puceau. Puis, un policier motard, digne d’être membre des Village People, est aussi interloqué par la virginité de l’ado.
En fait, Max a besoin d’affirmer sa personnalité, son intelligence et son courage au-delà du banal cliché du mâle. Pour ce faire, il est aidé par les braves et malignes Allison et Dani. Avec elles, il se bat et, grâce à elles, il est sauvé des faux ongles de Winifred. À ce duo, s’ajoute le chat ensorcelé Binx. Autrement dit, Max s’améliore au contact de personnages féminins ou fantastique. De là à dire que le classique modèle masculin est dépassé et inutile, il n’y a qu’un pas qui peut être allègrement franchi.
Reste à découvrir ce que le retour des sœurs Sanderson réserve aux spectateurs.trices en 2022.